En collaboration avec l’équipe juridique de Dawit Isaak en Suède, Reporters sans frontières (RSF) dépose auprès du parquet suédois une nouvelle plainte pour crimes contre l’humanité contre le président de l’Érythrée, Isaias Afwerki, et d’autres dirigeants érythréens.
Le 23 septembre 2024, le journaliste et écrivain Dawit Isaak, ayant la double nationalité suédoise et érythréenne, a passé 23 ans en détention sans jugement en Érythrée. Lui et ses confrères érythréens Seyoum Tsehaye, Temesgen Ghebreyesus et Amanuel Asrat, avec lesquels il avait été arrêté, sont les plus anciens journalistes détenus au monde.
Il y a dix ans,l’équipe juridique d’Isaak et RSF ont déposé une plainte auprès du ministère public suédois. Le procureur général a estimé qu’il y avait des raisons de croire que des crimes contre l’humanité avaient été commis envers Dawit Isaak et que la responsabilité de ces crimes, qui ont également été commis envers d’autres journalistes, incombait aux dirigeants érythréens. Le procureur général a également affirmé que la police suédoise pouvait enquêter sur ces crimes. Pourtant, il n’a jamais ouvert d’enquête. Après s’être entretenu avec le ministère suédois des Affaires étrangères, il a conclu qu’une enquête risquerait de nuire aux efforts diplomatiques déployés pour la libération de Dawit Isaak.
Cet argument pouvait être entendu il y a dix ans, il ne tient certainement pas la route aujourd’hui. Les crimes contre l’humanité sont une préoccupation mondiale commune, et la Suède a la lourde responsabilité d’enquêter sur ces crimes présumés. La plainte a été signée par Antoine Bernard, le directeur du plaidoyer et de l’assistance de RSF et par les avocats suédois de Dawit Isaak, Percy Bratt et Jesús Alcalá.
«Après 23 ans de négociations infructueuses, la Suède ne peut plus retarder l’application de la loi dans le cas de Dawit Isaak, le procureur général doit enfin ouvrir une enquête.»
Antoine Bernarddirecteur du plaidoyer et de l’assistance de RSF
«Il est maintenant grand temps pour la Suède d’assumer sa responsabilité internationale.»
Björn Tunbäckmembre du conseil d’administration de Reporters sans frontières Suède
Dans son dernier rapport, la Commission d’enquête des Nations unies sur la situation en Érythrée a affirmé que tous les États membres ont la responsabilité de traduire en justice les suspects de crimes contre l’humanité commis à grande échelle dans le pays.
La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a fermement établi que l’Érythrée viole la Charte africaine des droits de l’homme. Le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, qui a examiné le cas de Dawit Isaak l’année dernière, a estimé que l’Érythrée violait 19 articles du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Déclaration universelle des droits de l’homme, que le gouvernement a promis d’honorer.
La plainte est déposée à la demande de RSF, de sa section suédoise et avec le soutien de PEN Suède et du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de l’homme au Canada.
Au début du mois, RSF s’est associée au magazine indépendant français Society pour publier une série d’articles rédigés par certains des journalistes emprisonnés les plus connus au monde, dont Dawit Isaak.