RSF Suisse déplore le durcissement des « mesures provisionnelles » contre les médias adopté aujourd’hui par le Conseil national (photo Keystone-ATS). Ces mesures sont un instrument particulièrement puissant et leur renforcement représente une restriction injustifiée à la liberté de la presse. Il est hautement regrettable que le Parlement ait voté une telle modification sans que des experts extérieurs aient été mandatés au préalable, comme cela avait été fait à l’époque lors de l’adoption de la réglementation actuelle que les chambres ont choisi de durcir.

C’est sans raison sérieuse et sans étude approfondie que le Parlement a approuvé la révision de l’article 266 du Code de procédure civile permettant à un juge civil de bloquer en urgence la diffusion d’informations par les médias. RSF Suisse regrette l’adoption d’une législation d’humeur qui contraste avec le soin mis au début des années 1980 à élaborer des dispositions dont aucun examen circonstancié et objectif n’a démontré qu’elles étaient trop favorables aux médias.

Tout indique au contraire que le reproche qu’on peut leur adresser est d’avoir permis dans plusieurs cas à des plaignants disposant de moyens financiers importants de bloquer indûment et pour plusieurs semaines la publication d’informations légitimes, d’intérêt général et ne contenant rien d’illégal.

Le Parlement a par ailleurs manqué de s’interroger sur les atteintes à la personnalité commises sur les réseaux sociaux non par les journalistes mais par les simples internautes : ces derniers, n’étant pas des médias, ne sont pas concernés par le durcissement de la loi.

Le régime actuel, aujourd’hui amendé sans précautions, devait beaucoup au professeur Pierre Tercier, juriste extrêmement réputé. Interrogé l’an dernier par RSF Suisse, Pierre Tercier avait regretté la décision prise alors par le Conseil des Etats, jugeant qu’elle donnait un « signal dangereux pour la liberté de la presse ». C’est cette décision à laquelle le Conseil national vient de se rallier, à l’heure où l’Union européenne comme aussi le Conseil de l’Europe s’alarment de la montée des procédures « bâillons » visant à museler les journalistes.

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