Reporters sans frontières (RSF) condamne la disproportion du traitement réservé à deux journalistes suisses qui ont été longuement interrogés et mis à l’isolement pendant plus de 50 heures après avoir été arrêtés en marge d’un reportage sur l’inauguration du musée Louvre Abu Dhabi.
Alors qu’ils se trouvaient en reportage dans la capitale émiratie pour l’émission Mise au Point de la Radio Télévision Suisse (RTS) à l’occasion de l’ouverture du Louvre Abu Dhabi, le journaliste Serge Enderlin et le caméraman Jon Bjorgvinsson ont été interpellés jeudi alors qu’ils filmaient dans un marché en plein air dans un quartier où vivent des dizaines de milliers de travailleurs immigrés.
Mis à l’isolement, les journalistes ont été interrogés à de multiples reprises dans différents lieux. Ils expliquent avoir été transférés dans plusieurs lieux, à chaque fois les yeux bandés. Certains interrogatoires ont duré dix heures d’affilée. Au terme d’une “guerre nerveuse “ pour reprendre les termes de Serge Enderlin, les journalistes ont été contraints de communiquer les codes d’accès de leur téléphone et de signer des aveux “sur tout et n’importe quoi” pour pouvoir être libérés.
Nous condamnons fermement la réaction disproportionnée des autorités vis à vis des journalistes étrangers qui n’ont fait que leur métier, déclare Alexandra El Khazen, responsable du bureau Moyen-Orient de l’organisation. L’interpellation, la détention prolongée de ces journalistes et surtout l’obtention d’aveux sous la contrainte, relève de la pratique d’intimidation et démontre une méfiance excessive à l’encontre des médias qui souhaitent couvrir des sujets sensibles. Nous demandons par ailleurs aux autorités émiraties de restituer immédiatement le matériel confisqué lors de cette arrestation”.
Relâchés dans la nuit de samedi à dimanche, les deux journalistes ont pu regagner la Suisse, mais ont dû laisser derrière eux tout leur matériel – caméra, ordinateur et disques durs – saisi lors de leur arrestation.
L’équipe de la RTS qui avait été accréditée pour l’inauguration du musée le Louvre Abu Dhabi, avait également sollicité une demande d’autorisation de tournage, qui était toujours en cours de traitement. Les autorités leur ont reproché d’avoir filmé des travailleurs originaires du Pakistan, sur un marché de la périphérie de la capitale émiratie. Durant leur interrogatoire, la police a cherché à connaître les motivations de leur reportage et aussi à savoir s’ils collaboraient avec des ONG ou des Etats tiers. Les difficiles conditions de travail des ouvriers immigrés reste un sujet tabou aux Emirats, notamment pour la couverture critique qu’en a fait un certain nombre d’ONG, telles que Human Rights Watch (HRW).
Les Emirats arabes unis figurent à la 119e du Classement de la liberté de la presse établi par RSF.

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