Reporters sans frontières (RSF) condamne fermement la décision d’une cour d’appel guatémaltèque de révoquer l’assignation à résidence du journaliste Jose Rubén Zamora et d’ordonner son retour en prison. Rendu le 15 novembre, ce jugement constitue un nouvel exemple de la corruption qui gangrène le système judiciaire guatémaltèque et représente une menace sérieuse pour la liberté de la presse dans le pays.
Dans une décision consternante rendue le 15 novembre, une cour d’appel guatémaltèque a annulé le précédent jugement accordant l’assignation à résidence au journaliste Jose Rubén Zamora (photo: Johan Ordonez/AFP). Elle a ordonné, à la suite d’un recours déposé par les procureurs, son retour immédiat en prison. Jose Rubén Zamora, fondateur et directeur du journal elPeriódico, était en résidence surveillée depuis le 19 octobre, après avoir passé plus de deux ans en détention préventive arbitraire, pour des accusations fallacieuses de blanchiment d’argent, d’extorsion et d’entrave à la justice. Son équipe de défense a depuis déposé une demande de suspension provisoire du jugement, arguant que son retour en détention violerait ses droits fondamentaux et les normes internationales en matière de droits humains.
«Nous sommes profondément alarmés par cette décision judiciaire qui pourrait renvoyer Jose Rubén Zamora en prison moins d’un mois après sa libération sous assignation à résidence. Cette décision scandaleuse met en lumière la corruption persistante du système judiciaire guatémaltèque. La nécessité de la libération complète et inconditionnelle de Jose Rubén Zamora n’a jamais été aussi urgente. Nous appelons une fois de plus le président Arévalo à prendre au plus vite toutes les mesures possibles pour garantir la liberté pleine et entière de Jose Rubén Zamora et assurer sa protection.»
Rebecca Vincent
Directrice des campagnes de RSF
Le président guatémaltèque Bernardo Arévalo a immédiatement condamné cette décision, déclarant : «Ils veulent une fois de plus que Jose Rubén Zamora retourne en prison de manière totalement abusive et arbitraire. Notre système judiciaire est mis à l’épreuve, et le peuple guatémaltèque a clairement demandé le respect du journalisme. Toute résolution contre la liberté d’expression est illégitime. Le gouvernement guatémaltèque prendra des mesures pour défendre la liberté d’expression.»
La situation demeure critique pour le journaliste. À moins qu’une suspension provisoire ne soit rapidement accordée, Jose Rubén Zamora risque de retourner en prison, soit en s’y rendant volontairement, soit en y étant emmené de force. Le ministère public a averti que le non-respect de l’ordre d’un juge pourrait entraîner une responsabilité pénale pour toutes les personnes impliquées, du ministre jusqu’aux policiers chargés de sa sécurité.
Persécution judiciaire du journaliste emblématique
Âgé de 68 ans, Zamora a été initialement arrêté en juillet 2022 et a passé plus de 800 jours en détention avant d’être placé sous assignation à résidence. En juin 2023, il a été condamné à six ans de prison pour blanchiment d’argent. Ce verdict a été annulé, mais de nouvelles accusations portées par les procureurs, dirigés par la procureure générale Consuelo Porras – sanctionnée par les États-Unis et l’Union européenne pour corruption –, ont maintenu le journaliste dans un imbroglio judiciaire.
La persécution continue de Jose Rubén Zamora ne constitue pas seulement une violation de ses droits, mais envoie également un message glaçant à tous les journalistes cherchant à demander des comptes aux puissants. Parmi eux, au moins 25 journalistes guatémaltèques confrontés à des accusations similaires ont été contraints à l’exil pour éviter un sort semblable à celui de Jose Rubén Zamora.