L’appel de RSF et des associations de journalistes de sport

Alors que la Coupe du monde de football au Qatar s’est ouverte ce dimanche 20 novembre, des atteintes à la liberté de la presse pendant (et après) la compétition seraient inadmissibles. La Fédération internationale de football association (FIFA) avait formulé l’engagement de “garantir les meilleures conditions de travail possibles aux médias participant au tournoi” le 15 octobre dernier. Cette promesse n’a pas été pleinement tenue et il ne faudrait pas qu’elle soit trahie pendant la compétition. Les témoignages de journalistes de sport, inquiets de subir une interpellation, des violences, ou même une détention arbitraire, se multiplient.

Les autorités qataries imposent aux journalistes des règles du jeu drastiques et parfois abusives. Entendent-elles s’imposer comme arbitres de la vérité, distribuant ici les cartons jaunes, désignant là les lignes rouges ? Les rédactions ont dû ​​demander des accréditations de presse très restrictives, visant manifestement à les décourager de filmer quoi que ce soit en dehors des stades puisqu’elles indiquent que les journalistes ne pourront ni filmer, ni photographier dans “les propriétés résidentielles, les entreprises privées et les zones industrielles”, ces zones controversées où des violations des droits de travailleurs migrants ont été signalées. Face à la protestation, y compris celle de Reporters sans frontières (RSF), les conditions ont été formellement assouplies mais leur application est arbitraire. En témoignent les contraintes dont ont été victimes des journalistes, y compris l’invitation d’un journaliste américain à effacer ses photos du centre d’accréditation des médias de la FIFA.

Pire, une enquête journalistique a révélé un système d’espionnage mis en place par les autorités qataries, soupçonnées d’avoir recruté des hackers pour pirater les comptes emails privés de trois journalistes qui avaient publié des rapports critiquant l’émirat du Golfe. À quelques jours du coup d’envoi, alors que les équipes nationales commencent à entrer sur le territoire, la situation est tendue : un journaliste danois a été interrompu en plein direct et empêché de continuer son tournage sur la voie publique par des agents de sécurité.

Après avoir bafoué les droits humains lors de la construction des stades, le Qatar ne doit pas entacher la Coupe du monde en restreignant la liberté de la presse. La couverture d’un Mondial ne se joue pas seulement sur le terrain. Mais dans les gradins, dans la ville. Appréhender une ambiance, décrire un contexte. Et tout cela implique une liberté que bien des journalistes craignent de ne pas avoir. Pour faire vivre cet événement mondial aux lecteurs, aux téléspectateurs, aux auditeurs, le journalisme sportif ne demande pas moins et pas plus que ce qui permet le journalisme: la liberté.

Aux côtés des associations de journalistes de sport, nous exhortons les autorités qataries à respecter les journalistes, s’abstenir de faire barrage et suspendre les restrictions de captation d’images de certains lieux. Nous réclamons solennellement à la FIFA d’obtenir que les engagements qu’elle a pris soient respectés.

Le Qatar est classé 119e sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse publié chaque année par RSF.

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