La Suisse arrive au 8e rang du classement mondial de la liberté de la presse 2020 publié chaque année par Reporters sans frontières, alors qu’elle occupait le 6e en 2019. Son score reste toutefois stable par rapport à l’année précédente. La situation de la liberté de la presse ne s’y est donc pas dégradée depuis l’an dernier, mais les progrès réalisés par deux pays du continent américain, la Jamaïque et le Costa Rica, expliquent ce résultat. A noter que le classement de RSF a été réalisé sur la base de données collectées avant la crise du coronavirus, qui a eu des répercussions dramatiques sur la situation économique des médias et sur la liberté d’informer.

La Suisse continue à figurer dans la zone « blanche », celle des pays où la liberté de la presse est la mieux respectée. Elle y côtoie les pays scandinaves, qui occupent une nouvelle fois les meilleures places, et devance notamment la Nouvelle-Zélande (9e), le Portugal (10e) et l’Allemagne (11e).

Dégradation inquiétante

Si les médias bénéficient en Suisse d’un cadre légal, d’infrastructures et d’un environnement politique et social favorable à la liberté de l’information, ils font face toutefois à une inquiétante dégradation de leur situation économique que la pandémie du coronavirus a fait tourner au désastre ces dernières semaines.

La mutation numérique, on le sait, laisse les médias exsangues dans de nombreux pays. La crise économique que subit le secteur est l’un des facteurs qui peuvent mettre en péril l’avenir du journalisme et sa capacité à offrir l’information fiable, diversifiée et indépendante dont la démocratie a besoin, en Suisse comme ailleurs.

Suisse romande particulièrement touchée

Comme le prouvent les mesures récurrentes d’économie qui frappent de nombreux médias en Suisse, l’accélération de la concentration du secteur et la diminution de la diversité de l’offre journalistique affectent spécifiquement notre pays, en raison de l’étroitesse de ses marchés linguistiques et de la structure décentralisée du pays. Une presse régionale et locale forte et diversifiée est pourtant nécessaire pour que la démocratie, et notamment la démocratie directe, puissent s’exercer pleinement. La Suisse romande est particulièrement touchée.

Cette situation déjà préoccupante a été aggravée par la crise du coronavirus dans des proportions historiques. Indépendamment des résultats obtenus par la Suisse dans le classement, RSF Suisse condamne le refus du Conseil fédéral de débloquer une aide d’urgence aux médias pour faire face sans délai à l’effondrement des recettes publicitaires consécutive à la crise. Notre organisation demande que le Parlement examine et vote le plus rapidement possible les propositions que vient de lui adresser le gouvernement pour renforcer cette aide. Elle rappelle que l’aide aux médias ne doit en rien permettre aux pouvoirs publics d’exercer la moindre influence sur les contenus rédactionnels et l’indépendance éditoriale des médias soutenus.

Denis Masmejan
Bettina Büsser

En savoir plus: Le classement mondial RSF de la liberté de la presse 2020

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