Lors d’une conférence de presse organisée au siège de Reporters sans frontières (RSF), l’ancienne productrice de télévision russe Marina Ovsiannikova et le secrétaire général de l’organisation, Christophe Deloire ont raconté l’incroyable opération qui lui a permis de fuir la Russie.

Cinq jours après que Marina Ovsiannikova a brandi une pancarte anti-guerre lors d’un journal télévisé sur la chaine d’État Pervy Canal, le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire, parvient à joindre celle qui est devenue un symbole de résistance à la propagande russe. Il lui propose l’aide de l’organisation. Marina Ovsiannikova recontacte RSF en juin, depuis l’Ukraine. Puis en septembre, alors qu’elle est assignée à résidence à Moscou, équipée d’un bracelet électronique et qu’elle risque 10 ans de prison pour “diffusion de fausses informations sur l’armée russe” pour avoir donné le nombre d’enfants tués en Ukraine, un intermédiaire fait savoir à RSF son intention de fuir.

RSF l’assure de son soutien. Elle partira quelques jours plus tard. Faire sortir la journaliste de Russie et sa fille s’annonçait délicat et périlleux. Pendant quatre mois, dans la plus grande confidentialité, une cellule restreinte de collaborateurs de RSF œuvrera à monter cette évasion, qui portera le nom d’“opération Evelyne”. “Les moyens déployés par RSF ont été extraordinaires. Ils m’ont sauvé la vie,  ils m’ont aidé à fuir la Russie, ce pays où le pouvoir est détenu par les criminels de guerre”, a notamment déclaré Marina Ovsiannikova pendant la conférence de presse.

RSF a coordonné l’opération et la mise en sécurité de Marina Ovsiannikova. Il a été décidé d’attendre un week-end, pendant que les forces de l’ordre sont au repos. Elle neutralise son bracelet électronique avec une pince coupante. En tout, sept véhicules sont utilisés. Peu avant le passage de la frontière, le véhicule s’enlise dans un champs plein de boue, c’est à pied et dans le noir, en se repérant avec les étoiles qu’elle fera les dernières centaines de mètres avec son passeur. Après plusieurs heures d’errement, elle arrive à franchir la frontière et retrouve les contacts qui les attendaient.

Marina Ovsiannikova arrive en France au mois d’octobre. RSF s’est assuré au préalable qu’elle serait bienvenue en France. L’organisation s’est aussi occupée de lui trouver un logement, de lui faire ses premières courses et de lui organiser des rendez-vous médicaux et d’assurer le lien avec les autorités. Si tous les détails de cette fuite ne peuvent être dévoilés, pour des raisons de sécurité pour la journaliste, sa fille et les personnes qui l’ont aidée, RSF confirme par cette opération qu’elle a acquis une expertise en matière d’action discrète et efficace.

La démarche de Marina Ovsiannikova, conclut Christophe Deloire, “montre qu’il est possible de résister aux appareils de propagande, que l’on peut les ébranler de l’intérieur, dire non, qu’il est possible d’en sortir, de faire défection, de s’opposer à la falsification de l’histoire, de l’actualité, et à la manipulation.”

Classement mondial de la liberté de la presse – Russie

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