Encore un journaliste jeté dans les geôles turques sous des accusations de “terrorisme”. Arrêté le 26 juillet non loin de la frontière irakienne, le Français Loup Bureau a été placé en détention provisoire le 1er août, au terme de sa garde à vue. Le jeune journaliste est désormais en prison à Şırnak, dans le sud-est de la Turquie. Une région instable où il préparait un reportage sur la question kurde et la vie des populations locales.
Loup Bureau est officiellement accusé d’activités en lien avec le terrorisme. Un chef d’accusation malheureusement commun pour les journalistes en Turquie : RSF assistait encore la semaine dernière à l’ouverture du procès de 17 collaborateurs du quotidien indépendant Cumhuriyet, qui risquent jusqu’à 43 ans de prison pour “terrorisme”.
“Nous appelons à la remise en liberté immédiate de Loup Bureau, déclare Johann Bihr, responsable du bureau Europe de l’est et Asie centrale de RSF. Son incarcération et les lourdes accusations portées contre lui nous inquiètent au plus haut point. Loup Bureau n’est qu’un journaliste : nous espérons que l’enquête le reconnaîtra dans les plus brefs délais.”
Âgé de 27 ans, Loup Bureau termine ses études en journalisme : il doit soutenir son mémoire en septembre. Mais il a déjà multiplié les reportages sur différents points chauds de la planète : l’Égypte où il est resté un an après la révolution de 2011, l’Ukraine où il a coréalisé un reportage primé sur Maïdan et assisté à l’annexion russe de la Crimée en 2014, les zones tribales pakistanaises… En 2013, il a réalisé un reportage auprès des milices kurdes syriennes en lutte contre Daech pour TV5Monde. Ce que la justice turque semble tenir pour un élément à charge.
La Turquie est classée 155e sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2017 par RSF. Déjà très préoccupante, la situation est devenue critique sous l’état d’urgence proclamé à la suite de la tentative de putsch de juillet 2016 : près de 150 médias ont été fermés, les procès de masse se succèdent et plus de 100 journalistes sont emprisonnés, un triste record mondial. Les journalistes étrangers ne sont plus épargnés : plusieurs dizaines d’entre eux ont été expulsés depuis deux ans et quelques-uns sont emprisonnés, comme le journaliste germano-turc Deniz Yücel.